Je m’interrogeais dans mon dernier article, « Destin d’une mono-ville : Toyota city », sur les capacités du peuple japonais à se mobiliser alors que le système Toyota, si souvent montré en exemple, paraissait s’essouffler et mettre en danger la vie de plusieurs milliers de travailleurs.
Puis je me suis souvenu de mon passage à Hiroshima et de cette métropole au dynamisme palpable.
Le 6 août 1945, à 8.15 (heure locale), Hiroshima fût totalement détruite, sur un rayon de 2 km, par la bombe atomique américaine. Environ 140 000 personnes décédèrent suite à cette attaque et des milliers d’autres souffrirent des effets des radiations.
Cet évènement tragique de l’histoire n’a pourtant pas anéanti la ville d’Hiroshima. Dans les trois jours qui suivirent le bombardement, l’électricité fût rétablie et la vie reprit lentement son cours.
Dans les années 1960, le Japon connût une forte croissance, période appelée « le Jinmu boom », résultant en partie d’investissements massifs dans l’industrie lourde.
Hiroshima profita de ce dynamisme industriel pour développer son économie locale. Les usines d’assemblage de Mazda furent construites en 1964 et 1966. Parallèlement, l’industrie de l’acier se développa.
La municipalité favorisa la venue d’entreprises en appliquant une fiscalité avantageuse.
Aujourd’hui, de nombreux centres de recherche et des sociétés de design pour l’industrie automobile sont localisés dans la métropole nippone.
Bien que la ville se soit remise de cet épisode traumatisant, les autorités locales ont toujours cherché à promouvoir l’incroyable mobilisation de la population dans la reconstruction du territoire. Cette volonté de fer a fait d’Hiroshima un symbole de paix à l’échelle internationale influençant même les relations géopolitiques.
Le 8 avril 2010, un nouveau traité de désarmement nucléaire « START » était signé à Prague entre les États-Unis et la Russie.
Ce pas de géant dans les relations internationales, depuis la fin de la guerre froide, a fini de convaincre Hiroshima de se positionner en tant que hub mondial de la construction de la paix et du désarmement nucléaire.
Déjà désignée cité de la paix par le parlement japonais en 1949, la ville a établi, en 2011, son plan d’actions « Hiroshima pour une paix mondiale ».
Une des premières missions d’Hiroshima est d’accompagner les villes et territoires meurtris au cours de conflits et de les aider dans leur reconstruction.
Outre ce statut d’expert, la métropole envisage de devenir une interlocutrice de premier ordre ainsi qu’un espace de tables rondes et négociations sur les questions nucléaires, influençant davantage les décisions internationales.
Elle propose, dans le cadre du projet mondial de désarmement nucléaire, l’engagement des États-Unis, la Russie et les autres pays détenteurs de la bombe atomique à ne plus s’en servir comme arme de dissuasion.
Afin de réduire la dépendance à l’arme nucléaire sur les questions de Sécurité nationale, elle encourage la construction d’une confiance réciproque entre les pays « ennemis ».
En parallèle, elle travaille activement sur les mécanismes de construction de la paix dans le monde. Elle s’engage à mettre en réseau les institutions internationales, centraliser les archives et élaborer une politique éducative sur les questions de paix.
Inéluctablement, la paix durable se pense à Hiroshima.